On a lu pour vous …
Voici un livre court mais dense, léger à transporter mais profond en termes d’histoires de vie. Blandine Bricka est allée à la rencontre d’aidants, tous différents de par leur profil, leur trajectoire. Chemin faisant, Clotilde et Victor, Evelyne, Odile, Caroline et Nathalie, Michel et Marie-Thérèse nous (se) racontent… Chacun d’entre eux relate son parcours, ses combats, avec la volonté de ne pas sombrer -ce qui ne veut pas dire, occulter les difficultés… Et il y a forcément, l’une ou l’autre page qui vont « parler » au lecteur. Parce que si chaque expérience est singulière, il y a tout de même des similitudes, des questions, des constats qui rassemblent.
Entre autres choses, est pointée la « proximité distante » que doit développer un aidant, ni professionnel, ni « que » membre de l’entourage. Être aidant, c’est la gestion du planning de professionnels qui se succèdent, les courses, les démarches : « c’est comme si on gérait chacune [disent deux filles aidantes de leurs parents souffrant d’Alzheimer] deux maisons ». C’est se questionner sur la place de la colère comme moteur ou frein, c’est prendre distance par rapport aux professionnels : oser aller voir ailleurs face à des professionnels non-soutenants, ou à l’inverse, investir des relations porteuses, qui, surtout, proposent « quelque chose de concret » en plus d’une écoute.
Être aidant, c’est parfois souffrir d’être stigmatisé dans son univers professionnel, et dire à quel point un regard ouvert sur une situation complexe, une souplesse d’organisation, voire la reconnaissance de ce que le parcours d’aidant, amène comme « plus-value » professionnelle, est gratifiant !
C’est aussi interroger la force des liens familiaux, l’entente entre conjoints ou dans une fratrie, autour des enjeux liés à l’évolution d’un enfant, de parents. Ainsi, la répartition des tâches, en famille et/ou en lien avec des professionnels requiert de la vigilance, tout comme la place que prend l’accompagnement de son proche, vis-à-vis d’un système familial qui fonctionne aussi selon sa propre dynamique !
Il est impossible de dresser un portrait-robot de l’aidant type : si des leçons sont partagées, elles ne valent que pour ceux qui, lisant ce livre, s’y retrouvent. Solliciter des groupes de soutien, travailler sur soi, cultiver le calme et la sérénité, en interrogeant son accompagnement au regard d’une vie, nécessite du temps, une disponibilité, un lâcher-prise qu’on ne peut que souhaiter… Sans l’atteindre forcément. Pour autant, face à ce parcours d’obstacles imposés, et malgré les vents contraires, ces aidants nous disent une trajectoire qui change la personnalité, et qui n’est pas « que » fardeau. Paradoxalement, c’est parfois la cohérence qui est le fil rouge de ces vies heurtées. Et ce qui reste en mémoire à la lecture de ce livre, c’est que l’ADN des aidants, c’est la « générosité ».